Suite de mon analyse de quelques jeux NaNoRenO 2012. Après avoir testé deux petits VNs presque pour s’échauffer et découvert deux autres assez sympathiques, il est temps de s’attaquer à de plus gros poissons.
Clua
Durée : environ une heure (7 fins et des bonus)
Une princesse génocidaire comme héroïne ? Chic, alors !
Lady Os est la terrible princesse à la peau verdâtre du royaume pas très enchanteur d’Ulla qui est peuplé de créatures aussi étranges que décalées. Elle torture et abat sans vergogne ses opposants pour étendre le domaine de son père, ce qui lui vaut une réputation redoutable. Mais un jour, elle se réveille d’un trop long sommeil de quatre années dans une tour verrouillée en compagnie de son fidèle serviteur, Corvus. Un couteau est planté au travers de sa gorge. Muette et amnésique, elle va alors arpenter le donjon à la recherche du coupable.
The knife of the traitor était un des VNs Nanoreno que j’attendais avec le plus d’impatience, notamment à cause de l’illustration du menu : je suis littéralement tombée amoureuse du design de Lady Os avec sa peau verte, sa lingerie bleu rayé et ses yeux décoratifs. Et il est vrai qu’artistiquement il claque ! Les sprites sont très colorés avec plein de petites expressions variées et toujours dans ce ton burtonien fantasmagorique, ce qui est très agréable. Les event CG sont magnifiques et les chibi très mignons. On pourra reprocher aux BGs fait main d’être assez imprécis et vides mais ils tiennent tout autant la route et complètent très bien l’ambiance. Une réussite donc.
Sois pas si grognon, Gervase, tu finiras par l'avoir ton harem !
Pour ce qui est de l’interface, si le menu est nickel et le système irréprochable, on regrettera juste un petit bug dans la section Galerie qui empêche de retourner directement au menu principal et lance directement une nouvelle partie une fois qu’on clique sur Retour.
Du point de vue du son, je serais plus critique vu que j’ai une forme d’allergie à la musique 8bits et que toutes les pistes du VN tombent sous cette catégorie. Elles restent écoutables mais la mélodie du menu m’est très vite sortie par les trous de nez. A part ça les rares bruitages présents sont adéquats et on aura la douce nostalgie de reconnaître le petit tching issu de Yume Nikki dans les options.
Vu la qualité technique, ce que je craignais le plus dans The knife of the traitor c’était de découvrir le scénario et, surprise, il s’agit plutôt d’une comédie présentant bon nombre de moments désopilants. Les personnages sont tous étrangement attachants malgré le peu de temps disponible pour les décrire, même Os, pourtant muette une grande partie de l’aventure. Le but du jeu étant assez simple puisqu’il s’agit de parcourir trois lieux à l’intérieur du donjon où se trouvent trois bonshommes : Vosges le magicien-champignon, un shotacon à lunettes un poil tsundere qui déteste Os, Gervaise l’homme-chien bleu et pervers un poil tsundere qui déteste Os et Lilja, le...euh...la divinité mauve psychopathe et narcissique qui déteste Os. Oui, personne ne peut supporter notre héroïne à cause de ses antécédents de meurtrière (voire génocidaire). Le tout en compagnie d’un volatile noir bizarre, Corvus, qui, lui, voue une telle admiration envers sa maîtresse que ça en devient suspect. Prisonnière de la tour, Os devra pourtant coopérer avec ses compagnons de galère si elle veut trouver le coupable, d’où des interactions assez croustillantes. Si Lilja apporte au jeu tout son potentiel comique, celui-ci n’est pas exempt de sérieux et les quelques passages plus sombres apportent un background très bienvenu à toutes ces créatures. De ce point de vue-là, The knife of the traitor réserve d’ailleurs quelques surprises en matière de twists scénaristiques.
Oh, Lilja, tu sais que tu serais parfait en dieu du fanservice !
On compte une bonne et une mauvaise fin par personnage plus la route de Corvus (qui est au fond la seule vraiment romantique) et il faudra environ 30 minutes pour atteindre la fin du jeu en première partie. Globalement les fins sont toutes satisfaisantes en matière de résolution de conflit et se reposent majoritairement en une phrase de conclusion TRES évocatrice (j’ai envie de mentionner celle de la bad end de Gervase par exemple, qui est hilarante et froidement macabre à la fois dans ce qu’elle sous-entend mais ce serait du spoil). Si l’interactivité est bien le nerf du jeu, on regrettera cependant quelques difficultés dans certains choix où on ne saisit pas forcément pourquoi tel choix est important dans telle route et pas dans l’autre, par exemple. A noter un bug légèrement handicapant quand Gervase, sous sa forme de chien, vient foutre un coup de boule à Corvus : un seul choix s’affiche à l’écran et disparaît au bout de quelques secondes. Heureusement il n’y a besoin de sélectionner celui-ci que dans un seul cas et on peut contourner le problème quand on l’a compris mais il aurait été bon de corriger cela.
A noter plusieurs ajouts agréables comme le changement de l’écran titre en fonction de la bonne fin que l’on a débloquée (ci-dessous, celle de Vosges) et une partie bonus qui apparaît à l’intérieur du jeu une fois qu’on a achevé les quatre bonnes fins. Ce dernier passage mettant en scène Lilja et la déesse du fanservice dégouline de naouak et arrive à la fois à faire rire et à récompenser les lecteurs par des illustrations supplémentaires.
En conclusion, The knife of the traitor est un très bon visual novel qui a su s’affranchir des contraintes du NaNoRenO en allant à l’essentiel sans se prendre au sérieux et sans négliger d’approfondir ses personnages pour autant. L’aspect visuel très réussi parachève de donner au titre une identité propre. Je vous invite fortement à l’essayer.
Circle Pegasi
Durée : environ une heure (3 fins)
L'écran du menu une fois le jeu complété
Un soir de tempête un jeune homme planté devant son ordinateur est en train de créer un personnage pour jouer à un MMORPG qui a attiré son attention. Cependant, au moment de la finalisation la foudre s’abat et coupe l’électricité. Devant son ordinateur éteint, le voilà obligé d’attendre. Ce qu’il ne sait pas c’est que son personnage a déjà commencé à jouer. Sous le nom de ¢hu« le petit chevalier découvre son nouvel environnement avec curiosité...
Nanolife s’impose comme le plus « mignon » des titres participants avec ses illustrations chibi aux expressions craquantes et ses décors colorés haute résolution. Tous les personnages secondaires, même les plus anecdotiques, sont d’ailleurs représentés, ce qui donne une impression de vie à cet univers : des kikoolols aux joueurs expérimentés, en passant par des NPCs divers et variés (on pensera à la fille-chat adorablement tsundere ou à la sorcière), toute la faune habituelle des mondes geeks et otaks répond présent à l'appel. Puisque l’histoire se situe dans un MMORPG l’interface simule d’ailleurs les skills et les options des personnages avec la barre de vie qui descend par exemple, ou encore la petite mélodie quand on change de niveau, ce qui permet de mieux s’immerger dans le VN. On regrettera simplement que le système pourtant soigné aux petits oignons comporte une barre en haut de l’écran...qui ne sert pratiquement à rien. Impossible de sauvegarder par cet intermédiaire puisque tout se fait par les réglages situés au dessus du nom du personnage, ce qui est un poil confus quand on commence le jeu, heureusement il y a un tutorial disponible sur le menu principal pour clarifier la méprise. Au niveau des musiques, les quelques pistes utilisées sont agréables, sans plus, et se font discrètes (c’est bien tout ce qu’on demande).
L’histoire en elle-même n’est pas superbement originale et rappelle fortement la franchise .hack// (notamment .hack//sign) à certains moments mais elle est simple et efficace. Le VN repose beaucoup sur la naïveté de cette AI qui découvre un monde bizarre où les lapins trognons sont des ennemis mortels et sur ce jeu avec le lecteur qui, lui, connaît bien sûr tous les rouages basiques d’un MMORPG, même sans y avoir joué. Nanolife se pare donc d’un ton très léger qui en fait un VN facilement montrable aux plus jeunes, surtout que la romance y est totalement absente. L’interactivité est très présente, ce qui renforce ce sentiment d’immersion, mais peu importante dans le déroulement du récit. Il n’y aura guère de choix capital qu’au moment de suivre Iris, une archère sympathique et volontaire qui vous prend sous son aile, ou d’effectuer le « tutorial » d’Alesia, une demoiselle calme et polie qui est évidemment un NPC. Ces deux routes ont d’ailleurs la particularité de ne pas posséder de conclusion véritable, conclusion qui ne viendra que dans la troisième route, déblocable après les deux précédentes, et il faudra recommencer une nouvelle partie pour atteindre de nouveaux choix menant à la résolution du problème de ¢hu« qui ne saisit pas trop ce qu’il fait là et qui se découvre petit à petit. Une fin toute aussi mignonne que le reste et qui permettra de voir une image bonus dans la catégorie Extra.
Il n’y a pas grand-chose d’autre à ajouter, je crois. Circle Pegasi nous livre ici un petit VN sans prétention, adorable, qui donne finalement assez envie de tester Firefly, leur unique œuvre commerciale pour l’instant, un kinetic novel beaucoup plus long.
Cyanide Tea
Durée : environ trois heures pour compléter le jeu en entier (9 fins + 3 parties du prologue)
C'était trop tentant de lui donner un prénom adéquat, fufu...Oh allez, me regarde pas comme ça, Ethan.
Vous incarnez une charmante Mary Sue maladroite et bien intentionnée (au nom réglable, Lily par défaut) que son oncle a embauchée avec beaucoup de bienveillance dans un restaurant italien, Ristorante Amore. Parmi vos coéquipiers il y a Ethan, le brun à lunettes froid et sévère, Pierre, le prince charmant dans toute sa splendeur, Liam, le boy-next-door gentil et serviable, ainsi que Laura, la trop timide serveuse qui vous sert de confidente. Entre deux cassages d’assiettes, notre belle héroïne sentira son cœur fondre pour l’un des trois bishonens à sa disposition. Mais attention, Angelina, la terrible snob guette et pourrait bien vous mettre des bâtons dans les roues !
Vous l’aurez compris, Ristorante Amore a tout de l’otome game dégoulinant de clichés au premier abord. Rien qu’à voir le slogan du site officiel, on se dit même que c’est un peu trop stéréotypé pour être vrai...et c’est le cas puisque le scénario vous réserve quelques surprises. Il se compose d’un prologue (d’environ une heure si on le complète jusqu’au bout) et d’un post-prologue plus long et plus fourni en ressources. En effet, durant tout le prologue, vous n’aurez le droit qu’à un seul décor, aucun event CG et vos équipiers garderont toujours leurs uniformes. Il y a un côté presque claustrophobe à cette première partie, l’impression d’une routine impossible à briser. C’est probablement voulu par les créatrices, les deux siamoises de Cyanide Tea (elles se complètent tant si bien qu’à force on ne sait plus laquelle fait quoi), pour mieux nous libérer dans la seconde partie où les décors et les sprites se feront plus variés et où on aura enfin l’occasion de sortir à l’air libre.
Laura, votre meilleure-meilleure-amie que vous connaissez depuis 3 semaines, et Liam, le mec sympa
A propos des graphismes justement, on ne peut qu’admettre qu’ils sont particulièrement soignés. Les décors, par exemple, sont des photos retouchées et repeintes et l’effet est particulièrement bluffant. L’interface est aux petits oignons et colle bien avec le reste de l’histoire. On a même une petite animation en haut à gauche de l’écran pour signaler le temps qui passe (par contre elle devient un peu pesante à la longue, les ellipses étant très courantes dans le récit). Mais j’avoue que j’ai toujours eu du mal avec la patte d’Auro-Cyanide, et Ristorante Amore ne fait pas exception. Les visages sont anguleux, les yeux serrés, ça me dérange un peu et j’essaye de ne pas me focaliser sur cela mais les 5 event CG déblocables ajoutent quelques erreurs de proportions, surtout quand les personnages sont de profil, ce qui est franchement dommage et un poil désagréable.
Quant à la musique, je vais être honnête, j’ai fini par la couper vers la fin du prologue. Elle n’est pas particulièrement mauvaise avec ses tons jazzy qui donnent du cachet au restaurant, mais elle est très répétitive et on s’en lasse particulièrement vite.
Angelina, "la garce de service", et Pierre, le prince charmant français
Pour commenter le scénario, je vais être obligée de spoiler un peu, mais vous pouvez toujours sauter ce paragraphe pour passer au suivant si vous craignez de vous gâcher la surprise.
\!/ Spoilers \!/
Le twist de Ristorante Amore que promettait Camille, la scénariste, est au final à double tranchant. D’un côté il permet une nouvelle perspective sur ce qu’a lu le joueur lors du prologue et entame une forme de méta-fiction très intéressante, de l’autre côté, il n’est pas assez fort pour que le récit ne s’appuie que sur lui. Ce que je veux dire, c’est qu’une fois la révélation passée, maintenant qu’on connaît la véritable identité des personnages et qu’on suit le vrai héros de l’histoire...il n’y a plus rien. Le jeu étant fini, on ne saisit plus bien pourquoi on continue à lire, ce que les protagonistes ont encore à accomplir (d’ailleurs le héros lui-même nous confie qu’il ne sait pas quoi faire et il continue de travailler dans le restaurant alors que le « jeu » est fini, ce que j’ai du mal à comprendre), il n’y a plus de but à accomplir, plus d’horizon. On enchaîne les scènes de vie, sympathiques et vivantes, rien à dire là-dessus, mais on ignore quel est leur intérêt et ce que le jeu a à nous offrir de plus. La structure même de Ristorante Amore reflète ce problème narratif : il y a un prologue et un post-prologue, donc une introduction et une après-introduction...mais pas de développement !
Sur les 9 fins que propose le VN, Josh, le héros, pourra sortir avec ses 4 collègues (mâles ou femelles, on a le droit à deux de chaque), se foirer et finir juste ami avec sa cible, ou se foirer plus fort et finir ami avec tout le monde. Seule cette dernière fin et les réussites romantiques sont récompensées par des event CG, généralement une scène de baiser ou de tendresse qui clôture la route du personnage. Cette partie romance est fort agréable mais, je l’avoue, un peu décevante, je m’attendais à plus de peps. Après avoir démonté les clichés du prologue, le post-prologue exauce finalement ces mêmes clichés, juste pas comme on l’aurait pensé au début. Par exemple, les personnages qui paraissaient stéréotypés n’ont parfois qu’inter-changé leurs caractéristiques : ainsi Ethan qui paraissait « méchant » avec tout le monde se révèle le gentil garçon typique que Liam devait représenter et Liam lui-même devient le vrai « méchant » du groupe avec son côte je-m’en-foutiste et ses piques cinglantes. De même, de petite fille timide, Laura passe à la catégorie garçonne et Angelina, censée être détestable (d’ailleurs pas tant que ça) et toujours vêtue de robe de cocktail, se révèle être juste une jeune femme accro à son travail au point de se négliger un peu. Et Pierre...visiblement ce n’est plus un prince charmant idéal mais un homme normal, un changement qui me parait évident mais soit.
\!/ Fin Spoilers \!/
Trinquons à toutes les Mary Sue du monde ! (Les autres event CG sont trop spoilantes)
Au final, comme je l’avais annoncé dans ma news, Ristorante Amore est bien le titre du NaNoRenO 2012 le plus solide en termes de contenu : on sent qu’il y a eu un énorme travail sur les graphismes, l’interactivité, l’écriture. D’un point de vue strictement narratif par contre, le VN tourne un peu à vide une fois la surprise du post-prologue passée, quelques éléments supplémentaires concernant l’univers au lieu de se focaliser sur la romance tout de suite auraient pu pimenter le tout et élever Ristorante Amore à un autre niveau, ce qui est un tantinet dommage. Reste que le VN est plaisant et que la diversité des relations possibles (*tousse* boy’s love *tousse*) et les petits bonus additionnels intéresseront sûrement bon nombre de demoiselles. Si le défi de la team Cyanide Tea était de prouver leur valeur, il est réussi, cependant s'il s’agissait d’élargir le cercle de leurs consommateurs à l’approche de leur premier jeu commercial, Break Chance Memento (des bishonens, de l’inceste entre frères et des voyages dans le temps), je crains que ce soit plus compliqué. En tout cas, j’avais compté sur Ristorante Amore pour me rassurer et je ne me sens toujours pas prête à tester...
Normalement cette rétrospective (en retard) devrait s’arrêter là mais vu que le studio Dischan, responsable de Cradle Song, a annoncé que leur poulain allait bientôt sortir malgré le fait que la date limite soit passée depuis quelques semaines, il n’est pas impossible que je le commente à l’avenir. On verra bien...
Sinon, vous l'aurez remarqué, l'Eroge Mix d'avril est un poil en retard. Un spécial Kanako Ito, pour changer (donc avec de grands bouts de Nitro+ dedans et une touche de franponais, on ne se change pas, que voulez-vous).